La Maison de l’Érable – Histoire de relève d’entreprises
Au mois de mars 2023, Jean-Philip Bujold fait la rencontre de M. Jeannot Leblanc, propriétaire d’une érablière bien connue sur la route 299 à Caspapédia-Saint-Jules : la Maison de l’Érable. Il était loin de se douter que quelques mois plus tard, il prendrait la relève de cette entreprise qui s’inscrit dans le paysage acéricole de la région depuis maintenant plus de 30 ans. Portrait d’une histoire de relève bien de chez nous.
L’entreprise, en bref
La Maison de l’Érable est une érablière de 14 500 entailles située dans un cadre naturel exceptionnel au pied de la rivière Cascapédia. La production, d’un total de 70 000 livres pour la saison 2023, est destinée à deux principaux marchés : d’un côté, la Fédération des Producteurs et productrices acéricoles du Québec, et de l’autre, les acheteurs directs (commerçants, acheteurs en ligne, etc.). L’entreprise accorde une place importante au marché local, notamment en réservant une partie de la production pour consommation locale, grâce à des partenariats de vente avec des restaurateurs et des commerçants de la région. Elle transforme également une partie de sa production de sirop d’érable en contenant de 50 ml, vendus aux quatre coins de l’Amérique du Nord, notamment en Ontario, en Colombie-Britannique et aux États-Unis.
Comment s’est présentée à vous cette opportunité de relève d’entreprise ? Quelle est VOTRE histoire de relève ?
Formé en mécanique et ayant occupé plusieurs emplois dans les secteurs de la construction et de la production manufacturière, Jean-Philip n’avait pas envisagé jusqu’à tout récemment de faire le saut en entrepreneuriat. Puis en 2022, son contexte professionnel évolue et l’amène à un changement de trajectoire. Il se découvre alors une nouvelle passion : celle de la production d’érable. « Je me cherchais un projet qui pouvait me satisfaire. Dans mes derniers emplois, je n’avais plus réellement de liberté. Et j’avais toujours eu le goût de réaliser mes propres projets », raconte-t-il.
Il débute alors son aventure acéricole avec une petite érablière d’environ 1000 entailles située à New Richmond. Puis, au début de l’année 2023, il cherche à acquérir une autre érablière, afin de grossir sa production. « J’avais deux ou trois saisons de faites. Je savais qu’il fallait que je grossisse si je voulais transformer plus. Il y avait une petite érablière de 700 entailles qui était à vendre tout près de la Maison de l’érable. Je l’ai achetée. Et quand je l’ai achetée, le vendeur m’a dit ¨Si jamais tu t’en cherches une autre, Jeannot Leblanc veut vendre¨. Je suis allé voir Jeannot au mois de mars 2023, on a jasé, mais c’est resté là », explique le jeune entrepreneur.
L’histoire aurait pu se terminée ainsi, mais Jean-Philip fait alors preuve d’un grand sens des opportunités. « Quand Jeannot a eu le temps de désentailler, il avait besoin de quelqu’un. Je lui ai donné un coup de pouce. Il m’a expliqué ses méthodes, ses installations. […] Ç’a cliqué. On a commencé les démarches de transfert d’entreprise au mois de juin 2023 ». Quelques mois plus tard, Jean-Philip devenait propriétaire.
En quoi votre entreprise se démarque-t-elle particulièrement ?
La Maison de l’Érable se démarque particulièrement des autres érablières par sa moyenne annuelle de 4,2 livres de sirop d’érable par entaille, comparativement à une moyenne annuelle de 3,15 au Québec. Le secret ? Jean-Philip explique avec fierté que cette différence s’explique, entre autres, par les bonnes pratiques acéricoles qu’avaient mises en place l’ancien propriétaire Jeannot Leblanc : « Jeannot entaillait selon des patrons d’entaillage. Avec cette méthode, tu fais un trou l’année 1, et tu peux savoir où tu vas entailler les 40 prochaines années. Ça fait toute la différence. Les arbres guérissent plus vite, ça fait une meilleure performance, ça coule plus. […] Jeannot m’a aussi transmis l’importance de faire de la qualité. Il disait ¨Essaye pas de couper sur la qualité, parce que tes clients vont s’en apercevoir¨ Jeannot gardait seulement la qualité pour transformer ».
Jean-Philip souligne également que son érablière se démarque par la traçabilité de son produit : « Souvent, les gros transformateurs, le sirop vient de plusieurs érablières. C’est un mélange. Tandis qu’ici, je suis fier de dire que ce n’est pas un mélange, tout est fait ici. S’il n’y a plus de sirop, il n’y en a plus tout simplement».
Quels changements avez-vous apportés à l’entreprise ? Comment souhaitez-vous faire évoluer votre entreprise dans les prochaines années ?
Si le respect et le maintien des bonnes pratiques acéricoles léguées par son prédécesseur sont primordiales pour Jean-Philip, il souhaite maintenant développer certaines pratiques qui avaient été amorcées par les anciens propriétaires. Par exemple, l’érablière respectait déjà plusieurs exigences de la certification biologique. Jean-philip a ainsi entamé au cours de l’année un processus de pré-certification afin d’obtenir officiellement la certification biologique. « La certification permettra à l’érablière d’obtenir un meilleur prix par baril de sirop d’érable ». Le jeune entrepreneur a également agrandi le bâtiment principal afin d’y ajouter des bassins, ce qui permettra à terme d’assurer une plus grande capacité de production. Finalement, il aimerait développer davantage la mise en marché de ses produits transformés, notamment en développant l’exportation hors Québec.
Qu’est-ce que le soutien de la SADC vous a apporté dans votre projet de relève ?
Jean-Philip a obtenu de l’aide financière de la SADC grâce au Fonds Stratégie jeunesse, ce qui lui a permis de bénéficier d’un congé d’intérêt d’une durée de 24 mois et de compléter le financement nécessaire à l’achat de l’érablière. « Obtenir mon prêt à la SADC a été très simple », témoigne Jean-Philip.
Quels apprentissages avez-vous faits dans votre processus de relève d’entreprise ? Quels conseils aimeriez-vous donner à une personne qui souhaite se lancer dans un projet de relève ?
« J’ai été trois semaines dans le bois avec Jeannot. J’ai regardé la tubulure, les équipements. […] Passer ce temps-là avec Jeannot, ça m’a permis de voir, de poser des questions, de valider quels sont les problèmes, valider ce qui ne marche pas […] Ça m’a vraiment permis de connaître Jeannot, de comprendre sa façon de penser, sa façon d’opérer. […] J’aurais pu dire ¨Je ne vais pas le voir, j’en ai assez avec ma nouvelle érablière¨. Mais j’ai appris avec le temps, de ne jamais laisser passer une opportunité. Au pire, tu vas avoir perdu une demi-journée, mais tu n’auras pas perdu une opportunité ».
Une excellente anecdote, qui témoigne merveilleusement bien de l’importance que peut faire une seule rencontre dans le succès d’un projet de relève.
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À propos de Jean-Philip Bujold
Jean-Philip est propriétaire de la Maison de l’Érable, une érablière de 14 500 entailles située sur la route 299 à Cascapédia St-Jules. Il a fait en 2023 la rencontre de Jeannot Leblanc, laquelle l’a conduit à prendre la relève de l’érablière. Jean-Philip est originaire de St-Siméon de Bonaventure.